La flore insulaire est particulièrement riche et variée. Au total, on estime à 2500 le nombre des espèces qui poussent dans l’île à l’état naturel. Cent trente et une espèces sont totalement endémiques et 165 sont endémiques de Corse et de régions voisines.
Le Cap Corse possède un éventail remarquable de la flore insulaire. Des espèces extrêmement rares voire uniques, comme la Violette de Corse ou la morisie à fruits enfouis , dans le Cap Corse, leur terrain d’élection.
Jacques Gamisans, Maître de conférence honoraire à l’Université Paul Sabatier de Toulouse, grand spécialiste de la flore insulaire et auteur de plusieurs ouvrages sur la question, a assuré le contrôle scientifique de ce chapitre sur la flore. Dominique Liccioni, grand connaisseur de la montagne capcorsine, a recherché, pour chaque plante, son nom en langue corse.
La saison la plus favorable pour observer ces différentes plantes est, bien entendu, le printemps (de mars à juin) mais chaque période de l’année a ses particularités et ses richesses.
La présentation qui est faite, ici, ne se veut pas exhaustive. Les plantes décrites suivent « l’ordre d’apparition » sur le Chemin de Lumière, de 400 à 1000 m.
Arbousier (Arbutus unedo en latin, albitru en langue corse). Il est appelé aussi l’arbre à fraises. Chaque année, en décembre, il offre en même temps ses fleurs (blanches en forme de clochettes) et ses fruits (variants du jaune au rouge sombre en fonction de sa maturité). Les fruits, pâteux et sans goût, sont distillés en eau de vie ou préparés en confiture. L’arbre, aux belles feuilles vernissées, est le symbole du maquis. Il est présent entre 0 et 900 m.
Romarin, Rosmarinus officinalis ; u rosumarinu en langue corse. Famille des lamiacées. Plante aromatique au goût et au parfum très prononcés. Elle pousse dans le maquis et forme des buissons très touffus aux fleurs bleues, mauves et parfois blanches. Elle est surtout utilisée en cuisine dans les sauces, en marinade et en daube mais également en tisane. Elle se conserve sèche. Texte et photo: Dominique Liccioni.
Myrte, Myrtus communis L. a morta, a mortula en langue corse. Elle appartient à la famille des myrtacées.
C’est la plante du maquis par excellence. Elle a des baies noir bleuté qui arrivent à maturité en décembre. Les feuilles sont vert foncé vernissées et pointues, très parfumées lorsqu’on les froisse. Avec les tiges, on confectionne des nasses à langoustes ou à poissons, parfois associées aux tiges de l’oléastre (olivier sauvage). Les baies sont utilisées pour la réalisation de liqueurs ou d’eau de vie. Le myrte a joué un grand rôle dans les civilisations antiques : symbole de la beauté, de la jeunesse, il était consacré à Aphrodite, était lié au mariage (comme encore dans diverses contrées); on en tressait des couronnes pour magistrats, vainqueurs sportifs aux jeux. Texte et photo: Dominique Liccioni.
Cistes (Cistus, u mucchju en langue corse). Il est tellement présent dans le maquis que ce dernier, en Corse, porte son nom féminisé (a macchja). Floraison en avril et mai. Les fleurs, à cinq pétales, ne durent qu’un jour. Il existe plusieurs espèces de cistes. Les principales sont le ciste de Montpellier à fleurs blanches et à feuilles étroites ; le ciste à feuilles de sauge (fleurs blanches) et le ciste de Crète à fleurs mauves.
Genêt de Montpellier (Genista monspessulana). Floraison en avril-mai; espèce fréquente dans les lisières de maquis ou les formations arbustives naines; espèce ouest-méditerranéenne, commune en Corse sur tous les types de substrats, aux étages thermo et mésoméditerranéen (0-900 m d’altitude).
Lavande stoechas (Lavanda stoechas, u piumbone). Elle fleurit d’avril à juillet. Elle est très présente dans tout le pourtour méditerranéen. Elle apprécie les sols siliceux. Elle possède, à l’extrémité de ses épis, de grandes bractées violettes. C’est une plante très mellifère.
Muscari à toupet (Muscari comosum). Sa floraison (bleu profond, violacé) s’étale d’avril à juillet. Son nom vient de son parfum naturel : le musc. C’est une plante méditerranéenne. Photo : Marie Jourdain. Hellébore de Corse (Helleborus corsicus, a nocca en langue corse). Floraison (vert pistache) de février à mai. Les feuilles sont persistantes et toxiques.
Herbe à chat (Teucrium marum, a pivarella en langue corse). Floraison (fleurs roses) de juin à septembre. Cette plante est appelée herbe à chat car elle a la particularité de les attirer. Ils s’y roulent dedans avec un grand contentement.
Thym, Thymus herba barona Loisel arba ou erba barona en langue corse. Elle appartient à la famille des lamiacées.
C’est une plante aromatique très odorante, qui pousse en montagne sur des sols maigres.
Elle est surtout utilisée en cuisine pour parfumer les sauces. Pour son utilisation culinaire, il est préférable de la cueillir jeune avant qu’elle ne fleurisse (petites fleurs roses en juin et juillet). On consomme aussi le thym en tisane pour ses qualités digestives. Texte et photo: Dominique Liccioni.
Buis, Buxus sempervirens L. u bussu en langue corse. Famille des buxacées.
Le buis pousse le long des rivières et dans le maquis humide sur des versants exposés au nord (ubac). Il pousse lentement, son bois est dur. On fabriquait avec des cuillères, des fourchettes, des manches, etc…. Le buis servait aussi à confectionner les arcs de mariage. Il symbolise la paix et l’harmonie. Texte et photo: Dominique Liccioni.
Morisie à fruits enfouis (Morisia monanthos). Sa floraison s’étale de mars à mai. C’est une plante localisée sur les sols temporairement humides sur des substrats tels que les serpentinites, les schistes, les calcaires. C’est une espèce endémique corso-sarde connue en Corse seulement sur la crête du Cap Corse et sur le plateau de Bonifacio.
Euphorbe épineuse (Euphorbia spinosa; pas de nom corse répertorié mais on peut proposer lattone spinosu (lattone désignant toutes les euphorbes en langue corse). Sa floraison s’étale de mars à juillet suivant l’altitude; espèce nord-méditerranéenne fréquente dans les fruticées naines (formations arbustives naines) du nord et du nord-est de la Corse (Cap Corse, Tenda, San Petrone), aux étages méso-supraméditerranéen et montagnard (600-1400 m).
Cardamine de Plumier (Cardamine plumieri, pas de nom corse connu) : sa floraison s’étage d’avril à août suivant l’altitude. C’est une espèce orophile sud-européenne des éboulis, rocailles et rochers des étages mésoméditerranéen à subalpin (700-2000 m). Elle est présente sur tous types de substrats mais surtout sur les serpentinites et ophiolites en général. C’est une espèce peu fréquente répartie du Cap Corse à Bavella.
Orchis mâle à fleurs aiguës (Orchis mascula subsp.acutiflora, pas de nom corse connu). Sa floraison se développe d’avril à juillet suivant l’altitude. C’est une espèce européo-caucasienne des pelouses et fruticées naines des étages supraméditerranéen, montagnard et subalpin (800-1800 m). Elle est rare en Corse où elle n’est connue que dans le Cap Corse, la région d’Evisa et dans le massif du Rotondu.
Violette corse (Viola corsica subsp. corsica en latin ; viuletta corsa en langue corse); floraison de mars à juin (suivant les milieux et les années); sous-espèce endémique corse (une autre sous-espèce existe en Sardaigne). Elle est surtout répartie dans les fruticées naines (ici dans un buisson d’Euphorbia spinosa) de la crête du Cap Corse (cette violette n’existe nulle part ailleurs dans le monde). Elle est surtout présente sur les serpentinites et les schistes.
Parterre de printemps (mai 2009) à Sellole. Sont présents, des fruticées naines à xérophytes (coussinets de plantes épineuses) où l’on peut reconnaître l’Euphorbia spinosa (dominant), des Anthyllis hermanniae (plus rare) avec quelques arbustes plus élevés qui sont des bruyères. Parmi ces dernières on peut distinguer Erica arborea (bruyère en arbre, scopa maschile) reconnaissable à ses fleurs blanches et Erica scoparia (bruyère à balai, scopa feminile), plus jaunâtre et où les fleurs ne sont pas visibles.
Le peucédan paniculé (Peucedanum paniculatum, erba corsa en corse) dont les feuilles ressemblent à celles du fenouil et de la férule, est une espèce endémique qui sait se défendre : elle comprend des composés toxiques pour les herbivores et n’est jamais consommée. Le simple contact de son feuillage sur la peau rend cette dernière très photosensible et toute exposition au soleil se traduit alors par des brûlures au deuxième degré affectant la zone concernée. Eviter le short et les manches courtes dans les secteurs où elle abonde : le souvenir en serait cuisant… |